Soixante-dix-sept ans après, le souvenir et le sacrifice du lieutenant-colonel André Delaunay et de son ami le capitaine Marcel Bisault étaient honorés, samedi 28 août 2021 , au cimetière de Civray-de-Touraine, où repose André Delaunay, responsable interrégional sur cinq départements des Francs-tireurs et Partisans français, chargé des renseignements et de l'armement.

L'ADIRP37-41 était représentée par Danièle Bouhourdin et Claudette Sornin.

 

 

Le discours de Guy DEROUAULT (PCF)

 

Cérémonie Civray-de-Touraine Samedi 28 août 2021 – 15 heures Mesdames et messieurs, membres des familles Delaunay et Bisault, Mesdames et messieurs, membres du Comité du souvenir, Mesdames et messieurs les élus, Mesdames et messieurs, membres d'associations de la Résistance et de la Déportation, Mesdames et Messieurs, Chers amis, chers camarades, Au nom du Parti Communiste Français, quelques mots afin de ne pas oublier André DELAUNAY, Marcel BISAULT, et les nombreux camarades morts pour que nous puissions vivre libres. Le lieutenant-colonel André Delaunay et son ami Marcel Bisault, tous deux résistants de la première heure, sont tombés à Montrichard sous les balles allemandes. C'était le 13 août 1944, un parfum de liberté flottait sur notre région, les alliés venaient de prendre pied en Normandie ; à l'Est, après sa victoire à Stalingrad, l'armée soviétique poursuivait l'offensive contre le nazisme. Mais l'occupant était toujours là, avide de crimes. Nous ne pouvons oublier ce 13 août 1944, où nos camarades furent assassinés par les nazis. Nous ne pouvons oublier leur résistance, leurs combats et leurs sacrifices pour nos propres libertés, pour la libération de notre pays et de l'Europe, du joug fasciste. Oui ! Nous sommes les héritiers de ces hommes qui ont donné le jour, sous la présidence de Jean Moulin, au Conseil National de la Résistance. Ils ont fait ce jour-là un véritable choix de civilisation, comme l'ont fait nombre de résistants, organisés comme André Delaunay dont l’action déborda largement le cadre du canton de Bléré. Il contribua au développement du mouvement paysan et du mouvement antifasciste de la vallée du Cher. Le représentant de l'ADIRP 37 (association départementale des Déportés, Internés, Résistants et Patriotes) a retracé, il y a deux ans ici même, le parcours du lieutenant-colonel André Delaunay, discours que je vous invite à retrouver sur le site Internet «ADIRP 37-41». Pour rendre hommage à André DELAUNAY et à ses camarades, j'aurais pu, pour le 80ème anniversaire des exécutions à Châteaubriant de vingt-sept résistants, dont Guy Moquet et Jean-Pierre Timbaud, y associer ces martyrs que les nazis et le gouvernement ont assassinés pour faire taire toute résistance. Mais je souhaite aujourd'hui y associer le groupe Manouchian qui n’avait réclamé, selon l’écriture magique d’Aragon, «ni la gloire, ni les larmes, ni la prière aux agonisants ». 2 Si le groupe Manouchian est encore aujourd’hui l'ennemi de l’extrême droite, plus de trois quarts de siècle après l’exécution de ses membres au Mont Valérien, c’est en tout premier lieu parce qu’il a résisté aux forces de l’oppresseur nazi qui asservissaient, d’annexion en collaboration, toute l’Europe continentale. Parce que, malgré la violence, malgré la peur légitime pour soi et pour les autres, ils ont, comme André Delaunay, combattu les nazis et leurs affidés français. Riches de leurs origines, riches de leurs expériences militantes, riches de la diversité de leurs parcours, ils ont fait le choix du rassemblement, de l’organisation collective pour prendre les armes et combattre le fascisme. Ainsi, ils ont multiplié les actes de bravoure : déraillements et sabotages de lignes de train stratégiques, dynamitages de pylônes électriques, attaques contre des officiers nazis … Ils ont combattu inlassablement l'oppresseur, ils l'ont usé. Ils ont montré à TOUS que les nazis pouvaient être vaincus. À la suite d’un long travail de filature, l'ennemi à démantelé complètement leur réseau. Malgré la mise en scène de leur procès, l’hostilité de la presse de collaboration et l’affichage dans tout Paris de leurs visages « hirsutes et menaçants », rien n’y fit. ILS N'ETAIENT PAS DES CRIMINELS ! Ce groupe de résistance au sein duquel ils étaient organisés était celui des F.T.P.- M.O.I., le groupe de « Francs-Tireurs et Partisans de la Main d’Œuvre Immigrée » appartenant à la résistance communiste, et c’est à ce titre qu’ils ont été exécutés. Immigrés et Communistes ! Le groupe F.T.P.- M.O.I. visait à organiser au sein d’un même mouvement syndical et politique, en surmontant les barrières de la langue, les travailleurs migrants qui avaient à conquérir une même reconnaissance, de mêmes droits sociaux que toute la classe ouvrière. Ce fut l’un des principaux réseaux de soutien aux républicains espagnols qui, et c’est tout à leur honneur, ont combattu le fascisme PARTOUT où il était. Cette reconnaissance se réalisa deux ans après, dans une France en ruine, avec un gouvernement faisant le choix de mettre en œuvre des avancées sociales, économiques et politiques majeures : vote des femmes pour la première fois le 29 août 1945, création et mise en place de la Sécurité sociale par Ambroise Croisat, naissance de notre système de retraite par répartition. Le gouvernement nationalise les Houillères, Renault, les banques de dépôt et la Banque de France, l’électricité et le rail. Le droit à l’éducation et à la culture pour tous est instauré. Ce qui rend particulièrement insupportable cette mémoire chez les partisans de l'extrême droite, c’est son origine étrangère. Pour prendre racine, de tout temps et en tout lieu, l’extrême droite a cherché à fédérer tous les mécontentements au sein d’un récit national dévoyé, stigmatisant un ennemi commun venant d’autres horizons, désignant à la vindicte un bouc-émissaire, une fraction de l’humanité qu’elle accable de tous les maux. 3 Arméniens, juifs, espagnols, polonais, italiens, maghrébins, africains, asiatiques et d’autres encore. Chacun a été l’objet de ces attaques. Mais, par la portée de ses engagements et par son existence même, le groupe Manouchian anéantit ce discours de l’extrême droite. Ils étaient Français de préférence, natifs de diverses contrées. Ils se sont accaparés le combat pour un idéal de liberté, participant au péril de leur vie à la libération de la France. La Résistance, née du plus profond des peuples, joua un rôle déterminant dans les pays occupés, des montagnes de la Yougoslavie aux maquis du Piémont Italien ou à la campagne Tourangelle. C’est à tous les résistants qu’il nous faut penser aujourd’hui, et particulièrement en ce lieu, à André Delaunay et Marcel Bisault. Levés pour refuser l’inacceptable, ils combattirent le fascisme au péril de leur vie, de celle de leurs proches. Ils sont l’orgueil de notre peuple qui ne plie pas devant l’abominable. Aujourd'hui la peur de l’étranger se répand en Europe, elle se répand partout dans le monde. En Autriche, c’est le FPO, un parti revendiquant sa mouvance nationale socialiste. Ailleurs en Europe, les partis Aube Dorée en Grèce, le UKIP en Angleterre, la Ligue du Nord en Italie ou l’Alternativ für Deutschland en Allemagne, tous partis d’extrême droite sont à des niveaux préoccupants. En France le FN/RN ne défend pas la République. Il est élitiste, nationaliste-xénophobe, anti-migrants, raciste. Aussi personne ne peut savoir de quoi l’avenir sera fait et rien n’est jamais gravé dans le marbre ! L’État de droit et la démocratie ne font pas exception. Nul ne l’ignore, nous voterons l'année prochaine. J’ai l’intime conviction que le peuple de France saura ne pas se tromper de colère, ne cédera pas aux sirènes de haine, aux appels à la stigmatisation et à la volonté de fragmenter ce qui ne forme qu’une seule entité, la France. Nous aurons à l’esprit, je l’espère, ces deux vers de Paul Eluard, rendant hommage aux résistants : « La liberté d’un peuple oriente tous les peuples, un innocent aux fers enchaîne tous les Hommes ». Ces vers, je les dédits à nos camarades André Delaunay et Marcel Bisault qui, comme le rappel Jean Maurice Pialeport dans l'invitation à cette commémoration, ont tant combattu l’inacceptable, en tissant des réseaux avec des sympathisants qui informaient, aidaient, abritaient, transmettaient des tracts et courriers. Conservons donc ensemble l’espoir en une société de justice, de respect, d’égalité et de Fraternité ! Merci de votre attention.

Guy DEROUAULT

 

Le fermier et l’instituteur

 

Hommage au Lieutenant-Colonel André Delaunay et au Capitaine Marcel Bisault

Officiers FTPF-FFI tués en mission le 13 août 1944.

 

« Quoi que fassent ceux qui règnent chez eux par la violence et hors de chez eux par la menace, quoi que fassent ceux qui se croient les maîtres des peuples et qui ne sont que les tyrans des consciences, l’homme qui lutte pour la justice et la vérité trouvera toujours le moyen d’accomplir son devoir tout entier »

       Victor Hugo, Préface à la 1ère édition des Châtiments, 1853

 

I

 

En ce joli mois d’août, partout renaît l’espoir :

Les armées alliées, et tous les résistants,

Ecrasent le nazi, le pousse au désespoir,

Brisant son rêve hideux d’un règne de mille ans.

André comme Marcel, dès mille neuf cent quarante,

Refusèrent Hitler, Pétain et ses caciques,

Commencèrent alors la lutte résistante,

Généreux don de soi, tels des héros antiques.

Ils étaient communistes et ardemment français,

Infirmant les propos des fusilleurs nazis,

Pleins de haine et crachant sur les cadavres frais

De ceux qui refusaient une vie d’asservis.

Ils étaient communistes et ardemment français,

Rêvant que dans les plis des couleurs tricolores,

Se glissent en douceur, apportant de l’air frais,

Ceux du beau drapeau rouge aux multiples aurores.

 

II

 

Ce funeste treize août il partit de Thoré,

Quittant, le cœur serein, la ferme familiale,

Sa femme et ses enfants, en bordure du pré,

Lançant leurs doux baisers, en cette heure estivale.

Ce funeste treize août il partit de Saint Georges,

Quittant, le cœur serein, son école et sa classe,

La cour et ses platanes où chante un rouge-gorge :

Sa rentrée préparée, plus rien ne le tracasse.

Ils partirent confiants, avec leur bicyclette,

Retrouver leurs amis les combattants de l’ombre :

André fut abattu par une mitraillette,

Et Marcel emmuré dans une grotte sombre.

 

III

 

En Touraine à Civray, depuis longtemps déjà,

S’inclinent doucement les drapeaux de la France,

En hommage au héros qui est étendu là

Pour avoir au nazi refusé l’allégeance.

Sur la tombe fleurie, une photo d’André,

Les yeux tournés vers nous, ses amis d’aujourd’hui,

Comme s’il nous disait, par-delà le passé :

« Poursuivez mon combat car il n’est pas fini ».

Hélas ! Quand retentit l’hymne du souvenir,

Passent rapidement des automobilistes,

Sans le moindre regard, sans le moindre désir

De comprendre l’instant, comme de vrais autistes.

Désintérêt voulu ou fatale candeur,

Ils ne savent donc pas, enfermés dans leurs murs,

Qu’en lisant le passé, ils auront le bonheur

D’écrire le meilleur des possibles futurs.

 

IV

 

Oui André, oui Marcel, il parle bien de vous,

Dans son lointain exil, lui aussi résistant,

Le grand Victor Hugo qui donne rendez-vous

Au peuple glorieux, lucide et combattant :

« Ceux qui pieusement sont morts pour la patrie

Ont droit qu’à leur cercueil la foule vienne et prie.

Entre les plus beaux noms leur nom est le plus beau.

Toute gloire près d’eux passe et tombe éphémère ;

Et, comme ferait une mère,

La voix d’un peuple entier les berce en leur tombeau. »

 

 

                                               Jacques Ducol

En souvenir de ce 28 août 2021 et du chemin qui, de Civray à Faverolles, et de Faverolles à Orbigny, nous rendit à la fois si présent et si révoltant le martyre de tous ces héros de la Résistance.

 

 

ADIRP 37-41

Notre site : adirp37-41.over-blog.com

Nous contacter :  adirp.37@orange.fr

Retour à l'accueil