David Teboul a recueilli les témoignages de Milou, Denise et Simone, nées Jacob, dans un livre et un documentaire.
© (Photo Licence CC, Rob Croes)

 

Source : https://www.lanouvellerepublique.fr/a-la-une/simone-veil-et-ses-soeurs-un-recit-de-l-intime-des-trois-soeurs-jacob

 

Dans « Simone et ses sœurs », le cinéaste David Teboul a compilé des échanges inédits entre Simone Veil et ses deux sœurs, Denise et Milou. Une plongée dans l’intimité d’une famille bouleversée par la déportation.

Trois sœurs, trois voix. C’est à partir de leurs lettres que David Teboul a voulu raconter les liens qui unissaient les trois filles de la famille Jacob - Madeleine dite Milou, Denise et Simone -, qui ont survécu aux camps et aux affres de la Seconde Guerre mondiale. Des échanges pour la plupart inédits et compilés dans un document diffusé sur France 5 le 9 octobre et en librairie depuis le 12.

 

« Les sœurs Jacob se sont aimées »

 

« Les sœurs Jacob se sont aimées, écrit David Teboul en préambule. Elles se sont toujours confiées l’une à l’autre, elles n’ont jamais rompu leur lieu, aussi différentes soient-elles. » À tour de rôle, elles racontent leur enfance à Nice, les premiers amours puis les premières angoisses, avant que la guerre ne rattrape et brise leur quotidien. « Les hommes sont fous ! », écrivait Milou en mai 1943.

Moins d’un an plus tard, elle sera arrêtée avec Simone et leur mère Yvonne. Toutes les trois seront ensuite déportées à Auschwitz par le convoi n° 71, qui emporta aussi la cinéaste et écrivaine Marceline Loridan-Ivens. Denise, entrée dans la Résistance à Lyon, sera envoyée à Ravensbrück après avoir été arrêtée en juin de la même année. « Le destin de toutes ces filles était de ne pas survivre », raconte David Teboul.

Ce cinéaste cinquantenaire, rencontré autour d’un café dans un hôtel parisien, s’intéresse depuis plus de vingt ans à Simone Veil. Moins à la femme d’État, qui a fait adopter la loi dépénalisant le recours à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) et panthéonisée en 2018, qu’à la jeune fille déportée à l’âge de 16 ans, confie-t-il. « Ce qui m’intéresse c’est l’intime. C’est très universel », glisse le réalisateur de plusieurs documentaires.

 

Un récit de l’intime

 

C’est à la fin des années 1990, après avoir longuement insisté auprès de son secrétariat, qu’il rencontre finalement Simone Veil dans son bureau. « Elle est arrivée très en retard. Elle m’a demandé ce qui m’intéressait chez elle. J’ai répondu son chignon. De là on a parlé du statut des cheveux au camp [Simone Veil n’a pas eu les cheveux rasés à Auschwitz]. Et ce récit a entraîné tous les autres », se souvient David Teboul.

 

" Simone était la jeune fille qui racontait les camps "

David Teboul, cinéaste
 

De cette amitié est né un film, Simone Veil, une histoire française, réalisé en 2004, quand l’ancienne ministre se rend notamment à Auschwitz devant la caméra du réalisateur et échange au naturel sur la déportation avec Marceline Loridan-Ivens. « Elle a accepté très vite de me parler. On se voyait une fois par mois. Simone était la jeune fille qui racontait les camps, ce n’était pas la femme officielle que j’ai rencontrée. Elle disait toujours 'Môman' avec l’intonation d’une petite fille », poursuit le cinéaste.

Ces échanges réguliers avec Simone Veil nourrissent d’autres interrogations. Comment se reconstruire après l’horreur ? David Teboul trouve des éléments de réponse dans les liens familiaux qui ont soudé les sœurs Jacob. Si toutes les trois ont survécu aux camps - leur mère, leur père et leur frère Jean y ont été assassinés -, Milou décédera dans un accident de voiture en 1952. Un « arrachement » pour Simone, qui ne s’en remettra jamais complètement.

 

« Des vies anéanties »

 

Dans ce recueil de morceaux de vie, David Teboul publie pour la première fois des extraits du journal de Milou, qu’elle a tenu immédiatement après son retour des camps. « Simone m’avait parlé de l’existence de ces textes et m’avait dit de les transmettre », ajoute ce « militant de la mémoire ». « C’était important de travailler sur les trois sœurs. Ce sont des vies qui ont été anéanties. »

Simone Veil raconte devant la caméra du réalisateur avoir « vécu dans l’absurde ». « Ce qui m’a le plus marquée, c’est d’être passée de l’autre côté de l’humain », explique-t-elle. D’où cette proximité avec ses deux sœurs, avec qui elle a partagé l’expérience de l’horreur. Et à la question de comment retrouver le désir de vivre après les camps, elle ne trouve qu’une réponse valable à ses yeux : « on n’a pas le choix ».

 

Simone et ses sœurs, publié aux éditions Les Arènes, de David Teboul, auteur du documentaire Simone Veil et ses sœurs, diffusé sur France 5 dans l’émission « La Case du siècle » et disponible en replay jusqu’au 16 février 2023.

 

Guillaume SERGENT

Journaliste

 

 

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